Fin janvier 2023, le Canard Enchaîné a révélé l’existence d’un rapport sur les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) datant de 2021. Ce rapport a été rédigé par l’Inspection générale des Finances (IGF) et le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD). Ce document indique la « rentabilité très supérieure » des groupes ASF-Escota (Vinci) et APRR-Area (Eiffage) concessionnaires d’autoroutes par rapport aux estimations faites en 2006.
En 2006, lors de la privatisation des autoroutes, la rentabilité avait été estimée à 7,67%. Mais voilà, cette estimation a été largement dépassée !
Pour la société Vinci, elle atteint en effet 11,77%, et 12,49% pour Eiffage.
Ces deux entreprises auraient bénéficié de la baisse des taux d’intérêt et de l’optimisation financière opérée postérieurement à l’attribution des concessions.
L’écart pourrait s’élever à près de 6 milliards ?
Ce sont les pouvoirs publics qui ont fixé les conditions financières de ces concessions et le montant à demander à leur repreneurs. Ce montant a été alors évalué à une valeur inférieure à ce que la gestion des autoroutes concédées a rapporté aux sociétés bénéficiaires, soit une hypothèse de près de 6 milliards d’euros d’écart !
Cette somme aurait pu alors rentrer dans les caisses de l’Etat.
Qu’est-ce qu’une concession autoroutière ?
Avec une concession autoroutière, l’État confie à un opérateur économique privé, pour une durée définie en nombre d’années, diverses missions concernant les autoroutes : conception, financement, construction, entretien ou bien exploitation d’une infrastructure autoroutière. En contrepartie, les sociétés privées perçoivent les péages acquittés par les usagers.
19 sociétés d’autoroute
En 2020, le réseau concédé français compte près de 9 100 kilomètres d’autoroutes.
Les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) sont au nombre de 19 :
- 7 SCA historiques détenues par les groupes Vinci, Eiffage et Abertis, qui représentent 91,5% du chiffre d’affaires global ;
- 10 SCA récentes (2001-2019) ;
- 2 sociétés d’économie mixte (Semca) exploitant des tunnels alpins internationaux.
Des tarifs autoroutiers en augmentation
Début février 2023, le prix des péages a augmenté, en moyenne, de 4,75 %.
Le PDG de Vinci Autoroutes a déclaré récemment au journal le Parisien que cette augmentation était « une répercussion de l’inflation, que les sociétés concessionnaires subissent aussi». Et le PDG de Vinci, Pierre Coppey, d’ajouter que « les tarifs des péages allaient continuer d’augmenter ». En effet, le mode de calcul de revalorisation du prix des péages comprend une part (70%) liée à l’inflation : « Dans le calcul de compensation des investissements est prévue une loi d’indexation des tarifs qui sera appliquée ».
Qui dit inflation, dit donc hausse des péages, même si les bénéfices engrangés dernièrement ont été bien au-delà des prévisions !
Quelle mesure pour compenser ces super bénéfices ?
3 solutions sont évoquées par les pouvoirs publics:
– un raccourcissement de la concession de 5 à 10 ans en fonction des entreprises.
– un prélèvement sur l’excédent brut d’exploitation (EBE) de 2021 jusqu’à la fin des concessions à hauteur de 63 à 64%.
– une diminution des péages, ce qui permettrait aux usagers de bénéficier un peu de cette aubaine financière réalisée par les concessionnaires.